Débat généalogique

Débat généalogique Sigillum Robertus de Betuna

La mise au point sur les homonymies et notamment les relations de cousinage avec les Béthune Sully (de la 1ère Maison) et les Béthune Charost, amène à traiter brièvement un aspect devenu fort important – et tout à fait encombrant – dans l’historiographie de l’actuelle Maison de Béthune (Hesdigneul). Aussi déformé soit-il, ce débat est à clarifier ici vu sa notoriété et également, en fait, vu l’intérêt général de ses présupposés.

 

Nature du débat généalogique

La question d’une origine commune entre ces deux maisons a soulevé des discussions multiples, souvent agressives sinon passionnelles. On peut comprendre l’attirance des généalogistes et de tout un public pour ce type de sujet, mais il a fini par prendre presque toute la place, jusqu’à ne plus faire percevoir dans les Béthune Hesdigneul qu’un simple « cas » généalogique. On en est arrivé ainsi à occulter une réalité primordiale, élémentaire d’ailleurs : il s’agit avant tout d’une famille avec sa longue histoire et celle de ses membres.

 

Identité de la Maison de Béthune

 

Par elle-même, l’actuelle Maison de Béthune est d’un rang élevé, dans la ligne du constat posé par le Vicomte de Marsay. Son histoire avec ses développements actuels valent bien une attention marquée indépendamment de toute discussion sur les origines généalogiques.

 

Il y a lieu de tenir compte en outre, en cette matière, de deux observations, l’une spécifique à cette histoire particulière, l’autre d’ordre historique général.

 

Ce n’est parce que les preuves sont inadéquates qu’une thèse est fausse

Première observation, spécifique : la thèse traditionnelle d’une identité généalogique entre les deux Maisons de Béthune (si pas les trois quand on conteste la continuité entre la Maison médiévale et celle de Sully et Charost), n’a pas été réfutée. Simplement, elle n’est pas établie contrairement à ce que l’on avait pensé longtemps.

On a certes démontré que les preuves fournies jusqu’ici sont inadéquates. Mais, logiquement, on ne peut conclure à l’inexactitude d’une thèse de par la seule insuffisance des arguments avancés. On se comporte assez généralement dans le débat en cause comme si l’impossibilité de la thèse avait été prouvée, ce qui est tout autre chose.

D’ailleurs, depuis la publication des critiques les plus directes, des faits nouveaux sont apparus. Surtout, le cri d’armes « Bethune » des des Plancques à Azincourt, renverse plutôt la probabilité en rendant une consistance non négligeable à la thèse traditionnelle, puisque beaucoup de cris d’armes nomment la maison d’origine. Mais on reste toujours très loin d’une démonstration, et d’autant plus que la reconnaissance officielle de ce cri a conclu une enquête serrée mais dont les preuves précises n’ont pas encore été publiées.

 

L’origine généalogique ne fait pas toute l’identité d’une famille

Seconde observation, d’ordre historique général : n’établir l’identité d’une famille que par sa source généalogique, c’est prendre en considération son seul substrat biologique. Cette composante est d’une importance majeure et indubitable puisqu’elle englobe l’hérédité, mais cela est loin de faire le tout d’un homme et d’une famille. On ne peut donner à cette composante une primauté absolue au détriment de toutes les autres, souvent plus riches et significatives tel que le milieu social ou culturel.

Se limiter strictement à l’origine généalogique, c’est s’inscrire de fait, qu’on le veuille ou non, dans une conception raciale, susceptible de dérives rapides et fort dangereuses (partant notamment des prétentions nobiliaires à la « pureté du sang » pendant les Temps Modernes).

C’est aussi s’attacher exclusivement à un schéma de famille qui fut dominant pendant tout le second millénaire européen et appartient à ses meilleures traditions. Mais ce schéma ne peut en aucun cas être tenu pour la seule réalité familiale authentique ou la plus significative à tous égards. Les attaches lignagères par exemple ont pu tenir longtemps une place au moins aussi importante dans le même cadre géographique. De plus, la Foi chrétienne, qui est la référence fondamentale de la famille occidentale traditionnelle, affirme la supériorité absolue des liens spirituels, choisis librement par chacun, sur les liens du sang. Selon cette doctrine, la famille humaine, que l’on n’a pas choisie en naissant, s’accomplit pleinement, admirablement, avec une efficacité splendide, grâce à des adhésions spirituelles personnelles analogues.

Ramener tout à l’origine généalogique, c’est encore nier le sens de l’adoption, qui pourtant a caractérisé sous des formes élaborées la continuité de nombreuses grandes maisons comme celles d’Arenberg ou de Trazegnies. En définitive, c’est contester le rôle essentiel de l’éducation et des interventions de la volonté et de la liberté humaines dans l’évolution et l’identité d’une famille.